La richesse : une question de valeurs

par Robert Jasmin
La richesse : une question de valeurs

La COVID a ceci de particulier : elle nous cloue à la maison pour quelques jours en nous laissant à nous-mêmes, en marge des horaires habituels. Ce fut mon cas cette semaine. Je me suis plongé dans la relecture des œuvres de Milan Kundera. Toute relecture est nouvelle avec le temps qui nous a modifié ainsi que notre vision des choses. Mais il y avait aussi parmi les livres à lire, cette plaquette sur Kundera lui-même écrite par une grande journaliste que je n’avais pas encore explorée.

J’y ai appris certains éléments de la vie de ce grand auteur, une vie qu’il a toujours voulue discrète, disant que sa vie personnelle n’intéressait que lui-même et que seule son œuvre méritait d’être publique. Dans la foulée de ce que ce petit livre m’apprenait, un fait a attiré mon attention : Kundera a vécu, avec Vera, sa femme de toujours, dans le quartier de la rive gauche de Paris, où j’ai passé plus de deux ans comme étudiant en location de chambre chez une très vieille Parisienne, un appartement très classique du 19e siècle. D’un indice à un autre, je découvre que Kundera, quelques années après mon séjour d’étudiant, a habité exactement à la même adresse que moi, et ce, pour les trente dernières années de sa vie.

Kundera a vendu des millions d’exemplaires de ses essais et romans et tous ont été publiés dans toutes les langues. On peut concevoir qu’il était plusieurs fois millionnaire, mais rien dans sa vie ne le laissait voir. Or, le jour où je lisais sur Kundera, le hasard m’a fait remarquer, dans le Journal de ce matin-là, qu’un richissime Québécois venait de déclarer une faillite aussi monumentale que sa fortune. Sur deux pages complètes, on nous faisait voir son jet privé ainsi que l’extérieur et l’intérieur d’un condo construit sur les trois derniers étages de toute la surface d’un immeuble en hauteur de Miami. Ce condo trois étages est aujourd’hui en vente pour 74 M$.

D’où vient ce besoin irrépressible chez les ultras riches d’étaler leur richesse? Est-ce que cette preuve ostentatoire de leurs possessions est une façon pour eux d’être reconnus comme l’un des leurs par les autres ultras riches? Je n’en sais rien. Chose certaine, après une faillite monumentale et un retour forcé chez les êtres humains, on peut espérer que l’ultra riche retrouvera cette petite composante du bonheur : le désir.

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