C’est au début du 19e siècle, qu’Adolphe Quételet, mathématicien, révolutionne les idées de l’époque sur l’étude du comportement humain. Comme homme de sciences exactes, il sait qu’il faut prendre plusieurs mesures pour obtenir un résultat le plus fidèle possible à la réalité. Chacune de ces mesures contient inévitablement une part d’erreur que l’on appelle « erreur de mesure ». Si l’on fait la moyenne des mesures, on diminue automatiquement l’erreur de mesure. La moyenne devient alors une valeur qui s’approche de la vérité. Quételet a l’idée d’appliquer cette méthode aux sciences humaines et de prendre diverses mesures de l’homme tant au plan physique (grandeur, poids) qu’au plan social (l’âge du mariage, la quantité de pauvres, le nombre d’incidents criminels, le niveau d’éducation, etc.) et d’y établir une moyenne. Il vient alors de créer littéralement « la théorie de l’individu moyen ». Son raisonnement l’amène à penser que toute personne devrait souhaiter tendre vers la moyenne car cela est un gage de perfection. Quételet a eu une grande influence sur les dirigeants de l’époque et leurs décisions. Ceux-ci avaient la conviction d’enfin comprendre l’être humain.
Peu de temps après, Francis Galton, lui aussi mathématicien, apporte un point de vue différent: la moyenne dans un groupe traduit bel et bien le portrait de ce groupe, mais il est souhaitable pour un individu de se distinguer de cette moyenne pour se situer au-delà de celle-ci et ainsi tendre vers une certaine supériorité. Selon la vision de Galton, l’individu est placé dans un rapport de rang et devrait espérer être parmi les meilleurs.
Aujourd’hui, notre société est encore sous l’emprise de l’évaluation par rapport à la moyenne au détriment de l’individu dans son unicité et sa spécificité. Ce concept est si imprégné dans notre fonctionnement qu’il apparait normal et allant de soi. Pensons aux examens d’admission des écoles secondaires ou aux critères d’embauche des entreprises. On recherche ici un profil particulier qui est défini par rapport à la moyenne. Il s’est avéré que cet exercice de sélection n’est pas exempt d’erreurs puisqu’il échappe des candidats dotés d’un haut potentiel mais qui avaient un parcours plus singulier, en l’occurence non recherché.
Certaines personnes pensent qu’elles vont bien connaître un candidat qui se soumet à un test, à la seule lumière de ses résultats. Or, puisque l’humain est complexe, qu’il peut évoluer dans le temps et qu’il est sensible à son environnement, il serait probablement plus juste de conclure que le test cerne certains aspects de l’individu mais qu’il a une portée limitée. Il ne faut pas réduire l’évaluation d’une personne à un résultat unique de test, il faut aussi pouvoir la connaître à travers son originalité, sa richesse et son potentiel.