Les saumons étaient au rendez-vous l’été dernier à la passe migratoire de Cap-Santé. Mais le réchauffement climatique pourrait représenter un nouvel obstacle à sa migration dans la rivière Jacques-Cartier dans l’avenir.
La Corporation du bassin de la Jacques-Cartier (CBJC) a enregistré le passage du 410e saumon dans sa passe migratoire à Cap-Santé 16 septembre dernier, date de clôture de la migration annuelle.
En tout 193 madeleineaux (saumons de moins de 63 cm) et 217 redibermarins (63 cm et plus) sont revenus dans leur rivière natale. C’est 18 de moins qu’en 2020, alors que 438 saumons avaient effectué le grand périple d’environ 4000 km à partir des côtes du Groenland.
Selon Esther Carle-Pruneau, biologiste responsable de projets à la CBJC, malgré une légère diminution, le nombre de saumons correspond à celui qui était attendu. « Le saumon atlantique suit un cycle de cinq ans. L’an dernier, c’était le pic de la 3e année, en 2021 c’était la quatrième année. La diminution était prévue, mais elle est un peu plus faible que prévu », a expliqué Mme Carle-Pruneau, en entrevue le 25 janvier.
Le saumon continue d’être fidèle à la rivière Jacques même si le sommet de l’actuel cycle de cinq ans est plus faible que le précédent qui avait atteint 615 saumons en 2015. Les conditions dans la rivière et dans l’océan peuvent modifier grandement la migration des saumons.
Mais le principal obstacle qui pourrait influencer ce retour dans les prochaines années est sans aucun doute le changement climatique.
L’eau du fleuve Saint-Laurent tout comme celle de l’océan Atlantique se réchauffe. Les saumons, comme les truites, préfèrent les eaux froides et bien oxygénées. Ils pourraient peut-être en venir à bouder la rivière Jacques-Cartier, la rivière à saumon la plus au sud au Québec, si l’eau se réchauffe trop.
Esther Carle-Pruneau souligne que l’été dernier a été particulièrement caniculaire, notamment en août alors que deux vagues de chaleur se sont abattues sur le Québec. La passe migratoire a dû être fermée plusieurs jours, et plus qu’à l’habitude, afin de protéger les saumons.
Le bassin de la passe migratoire à Cap-Santé, par laquelle les saumons traversent l’obstacle que constitue le barrage hydroélectrique, est fermé lorsque la température atteint 23°C. La biologiste explique qu’à cette température l’eau n’est plus suffisamment oxygénée pour assurer la santé des poissons. Il est préférable qu’ils demeurent libres au pied de la passe en attendant que la température baisse.
Mme Carle-Pruneau souligne que des scientifiques étudient actuellement les effets que pourrait avoir le réchauffement climatique, et le réchauffement des eaux, sur la migration des saumons dans l’Atlantique Nord. « On va faire face à cette situation-là de plus en plus souvent dans les prochaines années », signale-t-elle. Est-ce que les saumons de la Jacques-Cartier vont préférer aller frayer dans des rivières de la Côte-Nord ou de Terre-Neuve? Cela reste à voir.
La biologiste de la CBJC indique que l’organisme poursuit ses études sur la rivière et l’aménagement des habitats pour le saumon afin que le roi des rivières du Québec s’installe à demeure dans la Jacques-Cartier qu’il occupait en maître jusqu’au 19e siècle et la construction de barrages à Donnacona et Pont-Rouge.