Elle dansait, dansait…

par Robert Jasmin
Elle dansait, dansait…

Le court vidéo a fait le tour de la planète. C’était le soir, à Téhéran en Iran. La foule, hommes et femmes, jeunes pour la plupart, bloquait le large boulevard urbain. Au centre, un feu de joie. Pourtant tous y étaient pour manifester leur dégoût et leur rage contre le pouvoir des religieux islamistes. Un pouvoir responsable de l’assassinat de Wahsa Amini, cette jeune femme de 22 ans, arrêtée, torturée et tuée pour avoir laissé voir un peu de cheveux sous un voile obligatoire.
Si j’ai écrit feu de joie c’était pour ce qu’on y brûlait : des voiles islamiques jetés par des centaines de femmes qui se libéraient de ce carcan religieux imposé par des dirigeants mâles obscurantistes et dominateurs, comme le sont d’ailleurs tous les dirigeants religieux ( deux mots contradictoires, me disait un ami croyant, car, selon lui, ce qui est religieux ne devrait jamais être dirigé mais personnellement inspiré). Puis, sortant de la foule, une jeune femme vêtue d’un chandail et d’un pantalon blancs et brandissant très haut son foulard, s’est mise à danser en tournant et virevoltant. Elle dansait, dansait, en se dirigeant vers le feu pour y jeter l’objet de son oppression sous les acclamations de la foule.
Après avoir vu cette scène de libération et la détermination de ces femmes, j’ai pensé à Mahsa Amini, morte sous les coups de ses tortionnaires, seule. Je me suis souvenu des paroles du chant « La marche de Sacco et Vanzetti », ces deux immigrants italiens morts sur la chaise électrique au Massachusetts il y a cent ans et dont l’innocence a été reconnue plus tard : ( je paraphrase ) Maintenant Mahsa Amini / Tu dors au fond de nos coeurs / Tu étais toute seule dans la mort / Mais par elle tu vaincras /. Oui, la victoire des femmes est inéluctable et l’assasinat d’une simple jeune femme est un assassinat de trop. Celle qui a dansé au nez des vieux barbus est la bande annonce de cette victoire.
La hargne et la haine contre les femmes n’est pas l’apanage des seuls pays lointains, Elle existe aussi dans l’occident dit développé. La Cour suprême des États-Unis vient de porter un dur coup à leur liberté de disposer de leur corps. Un candidat républicain aux élections de novembre vient de suggérer un amendement à la constitution pour enlever aux femmes…leur droit de vote. Gestes désespérés de la part d’un pouvoir vacillant qui a peur de celles qui dansent.

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