La saison des sucres, qui bat son plein plus tôt qu’à l’habitude dans Portneuf, s’annonce très bonne pour les acériculteurs. Et c’est tant mieux puisque la demande pour leurs produits est toujours en hausse.
C’est un bilan de début de saison fort positif qu’a tracé pour le Courrier Alain Gauthier, président des Producteurs et productrices acéricoles du Québec (PPAQ) Québec/Rive-Nord et copropriétaire de l’érablière des 5 Zef, à Rivière-à-Pierre.
La saison actuelle se différencie à plus d’un titre des précédentes, principalement par sa précocité. «Normalement, quand dans Portneuf on commence, les régions (du sud du Québec) sont rendues aux deux tiers de leur production. Actuellement, on est au même point que partout dans la province», affirme-t-il sur la base du plus récent sondage effectué auprès des membres de PPAQ, qui regroupe 1700 entreprises acéricoles.
«La production va très bien», renchérit M. Gauthier qui avait consulté quelques acériculteurs de Portneuf avant l’entrevue le 26 mars. «Sur le bord du fleuve, c’est peut-être un petit peu trop chaud. Mais dans le haut du comté, il y a eu de belles gelées presque toutes les nuits. Ça coule beaucoup», indique-t-il.
Cette température exceptionnelle a devancé la saison des sucres. «Normalement, ces temps-ci, il faut toujours trop froid et on ne produit pas. Depuis trois jours, je fais 50 barils par jour. C’est exceptionnel. J’approche de 25% de ma production. Depuis 41 ans c’est plutôt 5% de notre production à cette date-ci», illustre Alain Gauthier, copropriétaire de l’entreprise familiale avec ses frères Mario, Laurier et Rénald Gauthier et leur nièce Anne Gauthier, qui a pris la relève de son père Roméo.
Avec une météo à long terme qui s’annonce favorable, assurant des écarts de température essentiels pour la montée de la sève, M. Gauthier s’attend à «atteindre facilement 50% de la production d’ici à 10 jours».
Conditions exceptionnelles
Les conditions de neige et de température ont jusqu’à maintenant offert une excellente qualité de sirop à l’érablière les 5 Zef qui, avec ses 125 000 entailles, est la plus grande au nord du fleuve au Québec.
Le pied des érables est dégagé de neige et de glace, la sève n’a pas de difficulté à monter vers les entailles. Fait lié à une saison précoce, les journées sont encore courtes. «Lorsqu’on produit au 15 avril, le soleil est très chaud, la sève se gâte rapidement dans les tubulures, explique Alain Gauthier. Des journées plus courtes, il fait froid la nuit, la qualité de la sève est excellente. Le sirop est doré et délicat en quantité industrielle.»
Il note aussi que dans le secteur nord, il n’y a pas eu de séquences ensoleillées sans gel nocturne. Habituellement, une séquence de quatre jours sans gel diminue la qualité du sirop et sa classification.
En fait, le seul point qu’on peut qualifier de négatif est que la sève est moins sucrée. «L’an dernier elle était de 3,2, 3,5%. Cette année elle est à 2,2%. Ça prend beaucoup plus d’eau à faire bouillir et à séparer pour faire la même quantité de sirop. Mais il en coule tellement. Une bonne coulée c’est 0,3 gallon, depuis trois jours on a des coulées de 0,5 gallon par érable en moyenne», explique Alain Gauthier.
10 M$ dans le sirop
Le Québec demeure le principal producteur de sirop au monde, avec 70% du volume et des ventes qui ont doublé en 10 ans, pour passer de 68,2 à 144 milions de livres l’an dernier.
En 2020, les 1700 entreprises sous contingent (quotas) ont produit 170 millions de livres. Ils possèdent ensemble 48 millions d’entailles.
Ces acériculteurs vendent du sirop en vrac ou à des intermédiaires qui le mettent sur les tablettes des supermarchés.
Portneuf compte 134 producteurs sous contingent, soit les deux tiers des érablières de la région de Québec. Elles possèdent 1 166 000 entailles. L’an dernier, elles ont produit 3 742 000 livres de sirop, soit 2% du volume provincial. «Ça peut sembler peu mais ça représente environ 10 M$ de revenus, affirme le président régional des PPAQ. C’est quand même important pour la région. C’est de l’argent frais qu’on crée.»
Alain Gauthier souligne qu’on trouve également dans la région un nombre similaire de producteurs sans quotas qui vendent du sirop et d’autres produits de l’érable à la cabane. Ces petits propriétaires de 1000 à 2000 entailles représentent 250 000 entailles environ.