Du pain, des jeux et des princesses

Photo de Robert Jasmin
Par Robert Jasmin

Quand les empereurs romains voulaient que le peuple les laisse gouverner en paix, ils lui donnaient en pâture, du pain et des jeux. « Mangez et amusez-vous, pendant que nous nous occupons des vraies affaires ». Les temps n’ont pas vraiment changé, à une différence près : on ajoute aujourd’hui comme distraction, le feuilleton de téléréalité qui nous fait entrer dans les arcanes de la famille royale d’Angleterre. Genre Occupation double pour têtes couronnées. Au moindre mariage, à la moindre naissance, voire aux moindres gastros royales, les paparazzi reprennent du service et c’est reparti mon kiki. À chaque fois, on en a pour des semaines à se faire bassiner avec leurs petites histoires, leurs petites jalousies, leurs petits complots, leurs petites dépressions, leur p’tite vie en somme. Rien de bien différent de la vie que nous menons tous, avec ses hauts et ses bas, ses joies et ses peines, ses maux de ventre et ses maux de tête. Des gens bien ordinaires, mais avec des ancêtres un peu plus tordus que les nôtres car ils avaient les moyens d’être plus tordus. Ainsi, comme dans nos familles, ils ont des mononcles cochons mais un peu plus vicieux et cruels que les nôtres. Henri le huitième par exemple qui faisait trancher la tête de ses femmes successives pour en prendre une plus fraîche à chaque fois et fondait, tant qu’à y être, une nouvelle religion parce que le pape l’avait grondé. C’est dans cette religion qu’ Élizabeth Deux et ses fils se marient, ont des enfants et vivent comme ils peuvent en s’ennuyant parfois. Mais la famille Deux a maîtrisé l’art de la mise en scène. Alors quand un jeune Deux épouse une femme du peuple, on met le paquet et le bon peuple tombe en pâmoison. Et ça pogne ! Même au Québec. Hé oui ! L’instinct colonisé refait surface et on oublie la dignité. On oublie que ces monarques symbolisent la sujétion de notre pays à cette couronne qui nous a conquis un jour et qui, normalement, aurait dû retourner chez elle, dans ses terres. Mais c’était sans compter sur la veulerie de nos dirigeants qui n’ont pas eu le courage de dire à la famille Deux : Soyez royaux si ça vous chante mais chez vous pas dans ma cour ! Mais c’est trop demander. Et dans les mois et années qui vont suivre, des mamans d’ici vont continuer à rêver aux princesses et à nommer leurs enfants du prénom des nouveaux-nés royaux. P’tite vie !

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