Demain les enfants ! (2)

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Par Denise Paquin

2. De mars 1968 à mars 2018

En marge du dernier billet, certains peuvent se demander si la révolution de mai 68 en France a produit des résultats. Il me faudrait plusieurs pages pour simplement évoquer l’impact profond de ces jours de mai sur les valeurs et les mentalités des personnes qui les ont vécus, notamment quant aux rapports hiérarchiques dans la société. Qu’il me suffise ici de mentionner un des effets concrets et immédiats de la grève générale des ouvriers qui a pris fin par les accords de Grenelle qui ont résulté par une hausse de 35% du salaire minimum, entre autres choses.

Or, cette révolution sociale et politique a été initiée par de jeunes étudiants de 18 à 25 ans. La politique de tout un pays été chambardée du tout au tout par celles et ceux que le pouvoir considérait avec condescendance. La vie au sein des syndicats et des partis politiques a été profondément transformée par des jeunes dont on disait qu’ils ne faisaient pas partie de la vie active. Et tout avait commencé par les incidents du 22 mars 1968. Or, ces jours-ci, cinquante ans plus tard, au sein même du puissant empire américain, des plus jeunes encore, des enfants, ébranlent les colonnes du temple et entrent dans l’histoire par la grande porte.

Sur tous les réseaux américains mercredi dernier, on a vu ces enfants, d’est en ouest, dans la succession des fuseaux horaires, à 10 heures du matin, sortir de leur école et manifester leur ras-le-bol et leur détermination lors de manifestations à la mémoire des 17 victimes de la dernière des tueries de masse en Floride. Les inscriptions sur leurs pancartes et leurs propos étaient d’une lucidité renversante. Ils semblaient déterminés à ne plus tomber dans les pièges idéologiques de dirigeants hypocrites juste bons à inviter les gens à prier au lendemain de chaque tuerie. Comme disait cette jeune élève : «Les prières n’arrêtent pas les balles!»

Devant la Maison blanche, des centaines de jeunes se sont assis par terre en tournant le dos à celle-ci. Le silence qu’ils se sont imposé avait la valeur d’une condamnation sans appel de l’homme d’affaires qui a usurpé le titre de président des États-Unis. Heureusement, certains élus se sont déclarés solidaires des enfants. Élisabeth Warren, cette sénatrice du Massachusetts, a tout résumé en déclarant ceci : «Nous, les élus, étions détenus en otage par les marchands d’armes depuis des décennies et voici que des enfants sont venus nous délivrer.»

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