Abdiquer en souriant

Photo de Denise Paquin
Par Denise Paquin

Comme Justin, son patron, elle sourit tout le temps.. Si elle devait annoncer un tremblement de terre de force 9 dans Charlevoix, elle le ferait avec un sourire. Vous aurez peut-être reconnu la ministre Mélanie Joly. Jusqu’à ce jour, son sourire était plutôt innocent et, comme tout ce qu’elle disait, sans conséquences bonnes ou mauvaises. Mais ces jours derniers, elle s’est commise avec un geste d’une grande gravité tant pour la culture canadienne que pour la culture québécoise. Contrairement à ce que font déjà les pays qui se tiennent debout, le Canada, a-t-elle décrété, ne taxera pas la compagnie multimilliardaire Netflix. Son gouvernement jovialiste n’a pas voulu leur faire de peine, considérant peut-être qu’il n’est pas poli ou joli de froisser les gens importants, surtout étrangers. Car les diffuseurs canadiens ou québécois peuvent, eux, se faire plumer allègrement, c’est dans la famille et on n’a pas à se gêner. Lorsqu’on lui demande si ce n’est pas contraire au principe d’équité fiscale que son gouvernement prône sans relâche, elle semble ne pas comprendre la question. Mais elle garde le sourire. De mémoire, je n’ai jamais vu une levée de boucliers aussi généralisée devant une décision politique de cette nature. Personne n’a eu envie de sourire : ni l’ensemble de la presse écrite, ni le monde de la culture, ni le Conseil du patronat, ni les artistes, ni les défenseurs d’une culture canadienne ou québécoise. Tous étaient unanimes à dire que la ministre abdiquait. Ces jours-ci, Denis Villeneuve fait le tour du monde avec son film Blade Runner 2049. Hollywood a reconnu son talent et sa manière très personnelle de faire du cinéma. Lui-même affirme qu’il reste fidèle à ce qu’il a toujours fait au Québec et à la manière québécoise de faire du cinéma. Or, rappelons-nous que Denis Villeneuve a appris son métier d’abord parce que Radio-Canada lui en a fourni l’occasion avec la Course Europe-Asie et qu’il a pu, par la suite, faire valoir et exploiter sa créativité grâce à l’aide de nos deniers à tous. Nous devons trouver les moyens de faire naître d’autres Denis Villeneuve. Ces moyens se trouvent dans les coffres de ces Netflix de la planète qui doivent rendre à la collectivité une partie des milliards qu’elles lui ont soutirés. Il faut pour y accéder, un peu de courage politique. Celui-ci peut se manifester même avec le sourire.

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