Leur 150e, notre 483e

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Par Denise Paquin

Le 8 août 1988, un homme d’affaires québécois descend d’avion à Toronto pour y rencontrer un collègue canadien de sa compagnie. Le Québécois semble bouleversé et le Canadien le remarque. Ce dernier lui demande ce qui se passe: «L’agent de bord m’a appris la mort ce matin de Félix Leclerc!» lui répond l’autre. Le Torontois lui dit: «Felix Who?» Voilà, en une courte anecdote, comment on pouvait décrire la réalité de cette entité géographique qu’on nommait le Canada, il y a trente ans. Les choses ont-elles changé? Voyons voir! Le 30 juin 2017, on lance au Canada, avec fanfare et trompettes, une compilation des meilleures chansons canadiennes. Toutes de langue anglaise ! Universal Music Canada voulait ainsi célébrer les 150 ans de la Confédération. Mélanie Joly n’était pas contente. Mais pas question pour cette gentille ministre d’interpeller l’entreprise: «Ce n’est pas à la ministre du Patrimoine de faire de tels appels.» Pardon? La chanson québécoise ne fait pas partie du patrimoine canadien? Nous en prenons bonne note, madame Joly! Au prorata de la population, la chanson québécoise est beaucoup plus importante que tout ce qui s’est créé au Canada anglais (excusez le pléonasme). Elle s’est illustrée partout dans le monde francophone mais pas au Canada, comme le confirment les gens d’Universal Music Canada. Charlebois, par exemple, qui a gagné le Grand Prix de la chanson à Spa en Belgique en 1969. Félix, qui est plus connu en France que ne l’ont été tous nos premiers ministres. Léveillée, qui a composé des chansons pour Piaf. Les chansons de comédies musicales comme Stone [NDLR: de Luc Plamondon] qui sont connues par coeur par tous les jeunes francophones du monde à l’instar des chansons de Vigneault. Que dire des Jerry Boulet, des Cowboys fringuants, des Pierre Lapointe, des Ginette Renaud, des Jean Leloup, des Vincent Vallières, des Diane Dufresne, etc.? Vous êtes sûrement en mesure d’allonger la liste avec les chanteurs et chanteuses de votre choix. Comme on peut le constater, leur 150e de la chanson est un peu comme l’histoire qu’ils ont racontée de leur pays dans une série télé The story of us, pour laquelle, là aussi, nous avons eu droit à de plates excuses, de leur CBC, cette fois. Pourquoi ne pas faire notre propre compilation, avec nos chansons, histoire de souligner notre 483e anniversaire, car celui-là c’est bien le nôtre… 1534, ça vous dit quelque chose?

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