La «guérison» en cadeau de Noël

Photo de Mathieu Hardy
Par Mathieu Hardy

Ça faisait six mois que je n’avais pas revu Hugo. À 13 ans, il est l’un des rares adolescents dont le destin a été foudroyé par un méningiome de grade II. Je l’ai rencontré lors du Défi têtes rasées organisé par sa famille en mai dernier. À ce moment, son père Yves m’avait confié que les prochains mois allaient être déterminants pour son fils.

Décembre est arrivé et j’ai décidé de recontacter Yves pour savoir comment allait Hugo. Son état de santé précaire a touché le coeur des gens qui se sont impliqués au Défi têtes rasées. En plus des 12 000$ que la famille Marcotte a remis à Leucan grâce à leurs dons, leur générosité a donné à Hugo l’espoir de la «guérison» dont il profite aujourd’hui.

D’abord étonné de mon appel, Yves m’explique qu’Hugo va de mieux en mieux et il accepte de me recevoir chez lui pour une entrevue.

Je frappe à la porte du domicile familial, un dimanche soir, au début décembre, vers 19h.

C’est Hugo qui m’ouvre. Toute sa famille est derrière lui, comme c’est le cas depuis que le cancer a fait irruption dans sa vie en janvier 2015.

«Bonsoir! Vous allez bien? J’espère que vous n’êtes pas allergique au chat parce qu’on en a un!», dit-il en m’invitant à l’intérieur.

Surpris par l’empathie qu’il me témoigne au pas de la porte, j’entre dans la maison en étant guidé par un garçon souriant et visiblement content d’être encore là. Toute la famille me précède. On s’assoit à la table de la cuisine. Francine, sa mère, ouvre la discussion pour raconter comment le cancer a pris Hugo d’assaut.

Pour être bref, Hugo avait des maux de tête et vomissait de temps à autre jusqu’à ce qu’un examen de routine chez l’optométriste révèle un problème plus sérieux que les migraines d’abord soulevées par un médecin.

«Quand c’est arrivé, ça a été un choc! On partait d’une journée où ça allait super bien, le soir on se fait dire qu’il faut aller à l’urgence le lendemain parce qu’il a de la pression dans ses yeux et on se fait dire après qu’il a une tumeur au cerveau», explique la mère de famille.

Les mois qui ont suivi le diagnostic ont été exigeants pour les Marcotte. Les traitements et les rendez-vous remplissent leur agenda familial. La santé de leur plus jeune fils devient la priorité. En l’espace de deux ans, Hugo a subi six opérations. Si elle a un avantage, sa tumeur lui a fait voir du pays. Il a séjourné à Philadelphie pour des traitements de proton-thérapie qui lui ont sauvé la vie.

Après tout ce qu’ils ont vécu, ses parents et son frère aîné Lucas sont confiants pour la santé de leur protégé. Mais dire qu’Hugo est «guéri» est inadmissible pour eux. Je leur ai demandé pourquoi.

«On sait que le cancer est dans un noyau. Les médecins sont incapables de dire que le noyau est mort. C’est difficile de dire qu’il est guéri. Mais on sait qu’on a des bonnes nouvelles», a réagi Yves.

«À chaque fois qu’on avait une bonne nouvelle, on en avait une autre pire après. À chaque fois qu’on avait de quoi de bon, on redescendait plus bas», s’exprime Lucas.

Assis au bout de la table, Hugo écoute les membres de sa famille. Il est attentif à ce que disent ses proches et leur sourit pour leur donner son approbation. Ça parait dans son regard. Mais comme ses traitements lui ont causé des problèmes de mémoire à court terme, il parle peu.

On s’attarde ensuite longuement aux traitements qu’il a reçus à Philadelphie. Sa mère et son père racontent que là-bas aussi, de par sa force, sa résilience et sa bonne humeur, Hugo n’a laissé personne indifférent, comme ici dans la région.

«Quand Hugo a sonné la cloche de la liberté [à la fin de ses traitements], deux techniciens et des gens sont venus voir Hugo et prendre des photos avec lui. Je n’ai pas vu un technicien faire ça avec d’autres enfants et d’autres adultes», a soulevé Francine.

Soudain, Hugo brise le silence.

«Je parlais aux personnes en anglais et ça me faisait du bien à moi et ça leur faisait du bien à eux autres aussi», dit-il. Repenser à ce moment et en reparler lui a demandé beaucoup d’efforts.

C’est comme ça en classe aussi. Il doit trimer dur pour suivre les autres et il le fait sans broncher. En septembre dernier, il a pu enfin pu retrouver ses amis après une année d’école buissonnière provoquée par le cancer.

«J’étais content de revoir mes amis», a confié Hugo lorsqu’on s’est mis à discuter du retour à l’équilibre au sein de la vie familiale depuis cet automne.

Après des mois d’incertitude, l’heure est au bilan pour Hugo et ses proches. Certains profitent du mois de décembre pour faire le point sur l’année qui s’achève. Mais eux préfèrent se projeter dans l’avenir.

Une semaine après la dernière résonance effectuée le 10 décembre, ils ont été soulagés d’apprendre que ce qu’il reste de la masse est toujours stable et qu’il n’y a pas de changement apparent.

«Dans une semaine et un jour, on espère avoir encore un petit répit de trois mois», me disait Francine, lors de notre rencontre du 4 décembre.

Son voeu a été exhaussé. Par contre, une radio-oncologue vient de lui apprendre que plus le temps avance, plus les séquelles laissées par les traitements seront permanentes.

«Normalement, pour son enfant, ce qu’on souhaite, c’est que toutes les portes soient ouvertes. Pour Hugo, on en ferme quelques-unes par obligation. On voudrait que tout soit facile pour lui, mais dans le moment, il a plus de contraintes qu’un autre», a soulevé avec émotion Fracine lorsqu’elle m’a parlé des conséquences de la maladie pour l’avenir de son fils, alors que nous étions rassemblés autour de la table.

N’empêche que le cancer lui a ouvert d’autres portes. Hugo a accepté d’être l’un des jeunes porte-paroles au prochain Défi têtes rasées de Leucan dans Portneuf. «J’ai été bien heureux de voir qu’ils pensaient toujours à moi», a reconnu le principal intéressé.

«Continuez à être positifs et d’aller à vos traitements», voici ce que dit Hugo à tous les enfants et les adultes malades en ce temps de réjouissances.

Il est la preuve – vivante – que la guérison est un cadeau qu’il faut espérer et attendre avec patience.

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