Les intégristes

1. Nouveau mot, vieille réalité. L’actualité des derniers temps m’a incité à vous livrer quelques réflexions sur l’intégrisme, dans la présente chronique et dans les deux prochaines. Vous serez aussi surpris que je l’ai été d’apprendre que le mot « intégriste » est né très récemment, soit en 1913 et, au sein de l’Église catholique. Il a été emprunté à un aussi récent (1885) mot espagnol intégrista qui signifie « membre d’un groupe qui veut la subordination de l’État à l’Église ». Rapidement, toujours dans un contexte religieux, le mot s’est appliqué à l’islamisme. Mais si le mot est récent, la réalité, elle, est hélas, ancienne. Remontons le cours de l’histoire. C’est la croyance en un seul Dieu (monothéisme) qui a fait naître l’intégrisme. Avant, dans l’antiquité, la coexistence de plusieurs dieux ne créait pas vraiment de problèmes : nombreux, ils vivaient leurs petites chicanes entre eux et n’embêtaient pas trop les hommes. Ils ont même contribué à faire naître quelques-uns des plus beaux et grands mythes de l’aventure humaine. Ces dieux pouvaient être adoptés par d’autres peuples, simplement en changeant de nom. Par exemple, Zeus chez les Grecs devenait Jupiter chez les Romains. Quand les hommes (les femmes étant exclues du processus, j’emploierai toujours le mot homme ) ont décidé qu’il n’y avait qu’un seul Dieu, ils ont eu la mauvaise idée de le faire parler à travers un livre qu’ils ont qualifié de saint et auquel il ont attribué un caractère absolu. Les trois religions monothéistes, juive, chrétienne et musulmane, ont pris le même chemin. C’est le début des problèmes. Le premier : il ne peut y avoir qu’un seul absolu. Si mon Dieu est le bon et qu’il est unique, il ne saurait y en avoir un autre, encore moins deux autres. Il en va de même pour les livres qu’on dit être la voix de ce Dieu. Deuxième problème : si ces textes sont absolus, ils ne peuvent souffrir qu’une seule interprétation et ils ne peuvent évoluer dans le temps, sinon, ils ne sont pas absolus mais relatifs. Vous me suivez ? Et si un esprit curieux et libre ose affirmer que ces textes appartiennent à d’autres époques et qu’ils ont donc une valeur toute relative à cette époque, ils auront à affronter les gardiens de la foi, les orthodoxes, ceux qui n’entendent pas à rire, ni à penser : les intégristes. L’histoire regorge de leurs méfaits. C’est ce que nous verrons dans le prochain billet.

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